Sa paume enfonce le bouton et pendant un moment il n’y a que le silence.
Puis un bruit.
Ce bruit horrible de piège qui se referme sur lui.

Une douleur atroce lui transperce le bras et il hurle. Se débat. Tire de toutes ses forces.
C’est pire, la peau se déchire.

-Arrêtez, non ! Aaaargh, stop ! Je vous en supplie !

Son bras, ça fait si mal, tellement mal… Des larmes roulent sur ses joues, chaudes comme le sang qui s’égoutte de son coude, et quand tout s'arrête enfin, son corps tremble. La porte s’ouvre, mais il n’y a que l’écho assourdissant du silence dans sa tête. Les nerfs qui ne se connectent plus entre eux. L’archet désormais impossible à tenir. Il ne comprend pas où il sort ni pourquoi il sort. Son regard voilé se fixe sur une liane, elle pend de l'arbre et danse dans l'air humide. Il tend le bras, aperçoit le collier. Sasha. C'est son nom. Il le glisse à son cou, un collier demande à être porté, non ? Lui aussi se sent porter par une main qui le pousse.

Un grand bruit, encore.
De la chaleur, encore.
On peut le laisser, maintenant ? C'est fini ?

Des milliers de petits points blancs, noirs, dans sa vision. La chaleur moite de la nouvelle pièce sur toute sa peau, engourdie. Il enfile le collier comme un automate, et la voix expliquant le prochain jeu lui troue le crâne. Derrière ses paupières lourdes, ses yeux luisent, glissent lentement sur les participants restants. Bleu, rouge, rouge… bleu… Hugo est dans l’équipe des Chats.

La fin des explications tombent. Et Bone ne sait pas ce qui le submerge soudain ; un sursaut de colère, d’adrénaline, un éclair de lucidité. Malgré son bras et son pied en charpie, il est l’un des premiers à s’élancer entre les arbres. Il court vite. Chaque mouvement créer une décharge de douleur, mais semble décupler l’instinct animal qui lui coule comme un feu liquide dans les veines.

Sauf qu’il ne pourra pas aller bien loin, et surtout, il ne pourra pas jouer au chat et à la souris pendant toute la durée du carnage. Ça, il le sait. Son esprit le lui hurle, confus, entre deux inspirations saccadées. Rapidement, l’italien repère un arbre assez noueux, couvert de lianes. Sans réellement prendre le temps de se demander s’il sera capable d’y grimper, il s’y attaque. Tous ses muscles tremblent - qu’une jambe et qu’un bras vraiment valides, ce n’est pas l’idéal pour de l’escalade. Il réussit à se hisser sur une branche massive, cachée dans les feuillages, et dès que son dos s’allonge contre le bois, un hoquet étranglé lui bloque la gorge.

Il ferme les yeux avec force, quelques larmes chaudes s’échappent de ses cils, roulent jusqu’à sa mâchoire crispée. Il souffre le putain de martyr. Mais ce n’est pas de la peur, ou de la détresse, qui lui lèche le ventre ; seulement une espèce de folie meurtrière qui sait, et lui murmure en boucle, que si un participant grimpe pour essayer de le chopper, il devra le tuer.

Dans cet état second, bercé par les vagues de douleur, et d’agressivité figée, il attend.

Évidemment il avait fallut que l'autre abruti appui sur le mauvais bouton. Le blond avait hurlé de douleur, tirant sur sa main pour essayer de se dégager de la machine infernale mais rien à faire. 

Et finalement ça c'était arrête, le laissant parcouru de violent tremblements et haletant comme jamais, le cœur affolé par la douleur. 

Il lui avait fallut un moment pour réussir à juste bouger, geignant faiblement à la douleur qui le frappait à chaque mouvement qu'il faisait.

Il finit par sortir difficilement de la pièce avant d'aller glisser le collier autour de son cou, les traits tendus par la souffrance. Il observe autour de lui. Hmm... Dangereux. 

Lui ? Courir après des gens pour les blesser ? Non clairement pas, et encore moins dans son état. Il reste près des chats, un minimum de sécurité, mais surveillant les souris en orientant les chats sur les autres qui essayaient d'aller se cacher, pointant notamment les chemins empruntés par Shin et Bone

Pour une fois Drew avait pas merdé. Et c’est là que ce jeu s’avère vraiment réel. Peut-on vraiment en crever? Je commence à avoir de sérieux doutes après avoir gueulé tous les jurons de mon champ lexical. La télé brisée en mille morceaux, mon poignet en sang et le foutu trou dans mon épaule, je m’étais presque évanoui. Tout ce que je vois, c’est la tronche de Drew qui ne comprend toujours rien. Ça pisse le carmin, au moins je l’avais bien deviné, l’autre n’a rien sauf le nez. Me levant, j’arrache le bas de mon t-shirt avec mes dents pour une longue lanière et l’enfonce dans mon épaule. Bon, j’ai déjà connu pire et ce n’est pas le temps de chialer sur son sort. Le collier en place, j’attends les ordres en zyeutant la nouvelle pièce.

-Ouais, c’est ça, merde. On est deux chats, je propose qu’on se sépare, on n’a pas de temps à perdre. Tue tout ce qui bouge.

Partis chacun de notre côté, l’herbage est dense et la chaleur n’aide pas du tout ma blessure. Casser une branche ferait trop de bruit, puis je préfère me battre à coups de poing, c’est ma spécialité. Mon restant d’adrénaline me suit jusqu’à trouver une petite souris, saleté de Jungo.

-Tiens tiens, regardez qui se pavane. Prends ça dans ta gueule connasse!

L’ouverture de la porte jeta un éclair de lumière à l’intérieur de la pièce et le japonais y récupéra son t-shirt avant de rejoindre les autres. Une immense jungle humide se dessinait devant eux, avec une rangée de colliers dont le fonctionnement se passait d’explications. Il glissa celui à son nom autour de sa gorge et lança le sien à Jinzō pour qu’il en fasse autant. La chasse commença, et s’il songea à inverser les rôles, devenir une souris aux trousses des chats, la protection restait la meilleure stratégie pour l'emporter.

Il veillait à ce que personne n’emprunte la direction de la souris perchée en hauteur, en plus d’assurer ses propres arrières, près à envoyer du sable au visage du premier chat à entrer dans un rayon de trois mètres. Derrière lui, il reconnut une silhouette à la peau sombre, dont le collier brillait de la même couleur. Jamais deux sans trois. Cette souris-là aussi, il la garderait à l'œil, jusqu'à ce que les trente minutes soient écoulées.

Le bouton. Le piège qui se referme. Et la pointe qui transperce son bras. Sa mâchoire se crispe et il gronde à la douleur, résistant au réflexe de se débattre. Et la libération enfin. Il halète légèrement le temps de diluer la douleur et de détendre ses muscles, et finalement il franchit la porte pour sortir. 

Nouvelle ambiance, chaud, humide, des arbres et autres à pertes de vue. Les colliers avec leurs noms le tire un rictus moqueur mais aucune intention pour lui d'aller le mettre. Enfin jusqu'à ce que le collier en question lui arrive limite en pleine tête, faisant récolter à son lanceur un regard noir. Il croise les prunelles vertes et finit par passer le collier autour de sa gorge, le fermant ensuite avant de regarder autour.

Déjà les gens se courraient après, se frappaient, ne s'attirant que mépris de la part du japonais. Pitoyable. Pour sa part, le choix est rapidement fait. Il voit bien Masao et Altaïr qui portent des colliers d'une couleur différente de la sienne. Et si sa propre stupidité dans ce cas lui tire un sourire moqueur, ce n'est pas pour autant qu'il cherche à faire changer les choses. Tant pis si c'était lui qui mourrait avec ce jeu idiot. 

Il ne se donne pas la peine de parler, restant simplement assez proche pour pouvoir les protéger si besoin. Enfin, Masao se débrouillerait très bien sans lui mais on ne sait jamais. Il veille, attentif, jusqu'à ce que les 30 minutes se soient écoulées. 

Il n'avait même pas remarqué les explosions. Il n'entendait plus rien de toute façon. Il avait hurlé quand l'autre l'avait frappé avant de se rouler en boule et de rester juste là. Du sang qui voulait de son pied, de son flanc maintenant aussi mais il ne sentait plus rien, juste amorphe sur le sol. Jusqu'à à nouveau la voix. Faut bouger, encore. Alors il se traine sans plus penser à rien, sans même voir les autres gens. Il veut juste que ça s'arrête. Une salle puis une autre. Sa vue est trouble mais il voit vaguement un truc. Un bonbon à manger. Au point où il en est...Il attrape celui qu'il voit et l'avale avant d'avancer encore, automatique, toute douleur anesthésiée, le corps encore vivant et mobile mais l'esprit déjà mort.

La porte de la prochaine épreuve ouverte, le japonais gagna le premier sas. Des friandises. Un code entre les couleurs des murs et celles des emballages ? Cinq pièces, cinq minutes et l’inconnu au bout. Un pari à prendre. Son regard repéra un rouquin, le deuil lisible sur son visage, et il vint lui tendre deux bonbons, chiffre pair pour une salle paire – la quatre – puis lui murmurer à l’oreille.

-Il faut prendre un risque. Mange ceux-là et j’avalerai celui du dernier sas. Ils peuvent être un atout pour la dernière épreuve, ou causer notre mort, auquel cas cela te délivrera de ta douleur. Tu as plus à y gagner qu’à y perdre. Si je te vois en proie à un malaise je te le ferai régurgiter, et je me fie sur toi pour en faire autant au prochain sas.

Il attendit qu’il lui tende la main pour lâcher les bonbons et débloquer le passage, se tenant à sa parole en avalant celui de la salle cinq, aux aguets de la moindre réaction de son corps, comme de celui de son coéquipier alors que la porte de la dernière épreuve ne tarderait sûrement pas à s'ouvrir.