Déjà trois années que tu es arrivé à Lifeman, trois années que tu as quitté ta ville natale, trois années que tu n’as plus eu de nouvelles d’Artur. Au fond de toi, il te manque, tout te manque, son regard, son odeur, la douceur de sa peau, son regard qui s’embrumait lorsque tu le malmenait plus que nécessaire, sa petite voix suppliante… mais malgré ça tu n’as pas été le revoir, surement parce que tu sais au fond de toi que si tu recroise sa route tu risque de vriller sévèrement. Plus d’une fois tu as pensé à aller le chercher, à l’enfermer pour ne plus jamais l’avoir aussi loin de toi, de réellement l’enfermer. Et c’est bien ça le problème. Tes idées frôlent largement la malséance. Et tu as très clairement peur de ne pas savoir te retenir, d’aller trop loin cette fois-çi. Alors tu vis avec ce manque et durant ces trois années tu as réussi à trouver une oreille attentive, une âme en laquelle tu as posé toute ta confiance : Willow.

Vous n’étiez pas forcément amené à vous rencontrer, loin de là, mais c’est arrivé. C’est arrivé un soir où tu étais morose, d’une humeur massacrante, pour une simple erreur de livraison pour ta collation nocturne. C’est ainsi que tu as littéralement pété un câble. C’en est suivie une réclamation client, et ta première rencontre avec Willow. Etrangement, sa présence à réussi à te calmer, une première pour toi. Après plusieurs rencontres fortuites, ou fortement poussées par ta personne, vous avez fini par lier une relation amicale. Il fait partie de ces rares personnes à connaître tes vilains penchants, il est un peu le garde-fou dont tu as besoin dans ta vie, et pour cette simple raison tu lui voue un attachement très fort. Un peu trop fort.

C’est pourquoi, lorsque tu as cru comprendre que ton meilleur ami avait décidé d’héberger chez lui une personne dont tu ne connaissais même pas l’existence tu n’as clairement pas apprécié. C’était il y a quelques heures, tu avais décidé de sortir avec quelques élèves du pensionnat, la fête ça te connait et tu ne dis jamais non à une bonne petite soirée - sans alcool pour ta part- et il y avait un groupe de mannequin présent. Tes acolytes n’ont rien trouvé de mieux à faire que de les aborder et tu as commencé à discuter avec eux. De fils en aiguille, sans le vouloir dans un premier temps et l’alcool déliant la langue plus que nécessaire du garçon avec qui tu échangeais, tu as vite compris que l’un de ses amis était actuellement hébergé chez un PDG à la tête d’une société de livraison de nourriture. Tu as tiqué, avant de lui demander le nom de cette personne. Après quelques petits lapsus, le nom que tu ne voulais pas attendre est sorti : Willow Nakamura. Ton faux sourire s’est transformé en une moue contrariée, flippante le temps d’un instant, un instant trop long qui a fait fuir la personne avec qui tu discutais. Tu as laissé tes camarades en plan, sans la moindre explication.

Et, depuis, tu es arrivé devant la porte de son appartement. Ca fait maintenant plusieurs heures que tu attends, inlassablement. Tu as d’abord frappé chez lui, avec beaucoup d'insistance sans avoir la moindre réponse. Pas une seule. Tu as fini par bouillir, bouillir de fureur, te demandant même si l’autre demeuré qu’il hébergé était là et te laissait poireauter. D’un côté, il valait mieux ne pas t’ouvrir en cet instant. Tu es adossé à la porte, assis à même le sol, le regard fixé sur le mur en face de toi. Tu n’as plus dit un mot, ni vraiment bougé depuis. Ton visage est d’une neutralité malaisante, ton regard gris est glacial, aussi froid que les vents polaires.Tu es d’une humeur macabre, prêt à assassiner le premier qui osera t’adresser la parole en dehors de Willow que tu attends de pied ferme, sans la moindre attention de bouger jusqu’à ce qu’il daigne pointer le bout de son nez.